Il y a deux semaines, nous avons parlé de la viabilité de l’économie de l’hydrogène et de ce que cette nouvelle perspective implique pour l’avenir des métaux rares. Cet article-ci s’engage a examiner de plus près deux secteurs spécifiques qui seront probablement transformés par la révolution de l’hydrogène.

En ce qui concerne l‘hydrogene, la presse actuelle nous parle surtout des véhicules à pile à combustible, en indiquant que ceux-ci pourraient remplacer les voitures électriques en tant que solution de transport future plus écologique et plus économe en énergie.

Cependant, l’hydrogène ne sera pas utilisé uniquement pour l’automobile, raison pour laquelle on peut parler d’un véritable basculement vers une économie de l’hydrogène. Voici quelques spécificités techniques distinguant deux autres applications importantes proposées pour ce gaz:

 

L’avion à hydrogène « blended wing » proposé par Airbus

 

Avions a hydrogène

  • En quoi un avion à hydrogène sera-t-il différent d’une voiture à hydrogène?Un avion a besoin de beaucoup plus d’énergie et l’hydrogène sous pression ne suffirait pas. Il faudra donc de l’hydrogène liquide (cryogénisé à -253°C) stocké dans les sphères refroidies et fortement isolées (surtout pour des voyages de plusieurs heures). Fini donc le stockage de carburant dans les ailes comme pour le kérosène. Les défis techniques sont nombreux mais ne semblent pas insurmontables grâce à l’expérience acquise dans le spatial qui a déjà recours (bien que pour des durées de propulsion bien plus courtes) à l’hydrogène liquide.
  • La pile à combustible a un ratio poids/puissance bien trop faible pour l’aérien (2 à 2.5 kw/kg). Il doit donc être abandonné au profit… d’un turboréacteur qui, au lieu de bruler du kérosène va bruler de l’hydrogène. Il y a là aussi quelques subtilités techniques mais les moteurs actuels, bien que non optimisés pour l’hydrogène, pourraient fonctionner avec ce gaz. Le refroidissement de l’air entrant dans la turbine par l’hydrogène liquide (qui se réchaufferait ainsi avant d’arriver dans la chambre à combustion), permettrait par ailleurs un gain d’efficacité de la turbine. Enfin, il semblerait que la combustion de l’hydrogène dégage, à puissance identique, une chaleur inférieure à celle du kérosène, ce qui permettrait de diminuer les contraintes mécaniques sur les superalliages au nickel et de diminuer ainsi les coûts de maintenance. Dans un tel schéma, les besoins en métaux rares de type rhénium et ruthénium dans les superalliages au nickel, devraient donc demeurer les mêmes qu’actuellement (nonobstant des évolutions générationnelles).
  • La présence de réservoirs sphériques dans le fuselage implique de repenser l’architecture complète des avions. Le concept d’aile volante présenté par Airbus va dans ce sens.

L’avion à hydrogène d’Airbus devrait pouvoir transporter 200 passagers sur 2000 miles d’ici 2035. En outre, la start-up ZeroAvia, qui compte parmi ses investisseurs Jeff Bezos et Bill Gates, tente de voler la vedette d’Airbus en prenant des premiers pas plus modestes, mais plus tôt: La société prévoit de fabriquer un avion à hydrogène à 19 places d’ici 2023, en vue de créer un avion à 100 places avec une autonomie de 1000 milles d’ici 2030.

 

Métallurgie à l’hydrogène

L’Hydrogène pourrait être utilisé dans les industries très fortement émettrices de CO2 comme la sidérurgie/métallurgie ou la cimenterie.

La sidérurgie utilise aujourd’hui charbon (coke) et gaz comme sources d’énergie et aussi comme agent réducteur qui arrache son oxygène au minerai de fer, formant ainsi de très importantes quantités de CO2. Il faut environ 780 kilos de coke pour produire une tonne d’acier.

 

La métallurgie est actuellement une de nos industries les plus émettrices de CO2.

 

Schématiquement (car en réalité on a différentes étapes de réduction-fusion au haut fourneau, puis affinage de la fonte) on a : C + FeO => CO2 + Fe (plus un peu de carbone pour obtenir la fonte puis l’acier).

La sidérurgie à l’hydrogène consisterait à remplacer le coke par du H2. On aurait alors : H2 + FeO => H2O + Fe

Ce type de sidérurgie ne rejetterait que de l’eau pour produire du fer qui, par passage dans des fours électriques, pourrait permettre d’obtenir de l’acier.

Il faut ici rappeler que la sidérurgie émet entre 7% et 9% du CO2 mondial (contre environ 3% pour le secteur aérien).

 

L’économie de l’hydrogène: Perspectives pour les métaux rares

L’hydrogène est une proposition énergétique désormais réalisable avec une large gamme d’applications économiques potentielles, offrant à la fois une alternative efficace et stable à l’énergie potentielle électrique en tant que solution de stockage et de transport énergétique, et un bilan écologique positif.

Les métaux rares seront au cœur du déploiement de ces nouvelles technologies.

Toutefois, bien que le prix d’un élément critique puisse être porté par sa criticité, cette même criticité peut aussi devenir un facteur limitant qui rend le déploiement à grande échelle d’une technologie prometteuse non-viable à long terme. Tel est l’équilibre fragile que l’investisseur en métaux rares doit surveiller.

La dépendance de l’Occident aux pays producteurs tels que la Chine pour l’extraction de métaux rares critiques exacerbe ces enjeux de criticité. Ainsi, le recyclage des métaux rares utilisés dans la production d’hydrogène, tels que le ruthénium et l’iridium, et des métaux rares employés dans la production d’énergie renouvelable, tels que le néodyme, l’argent, l’étain, l’indium et le tellure, sera certainement crucial. Le recyclage des métaux rares est l’un des principaux défis auxquels le Projet Gallium envisagé par Vincent Donnen, associé CDMR, en association avec un consortium croissant de leaders industriels européens, vise à répondre.

En attendant, il ne fait aucun doute que si l’économie de l’hydrogène se développe comme le suggèrent de nombreuses prévisions, les métaux rares susmentionnés seront les matières premières investissables à surveiller. Attendez-vous à en découvrir davantage au sujet des investissements dans les métaux nécessaires a l’économie de l’hydrogène au cours des mois et des années à venir.

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